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Pratiques et Techniques de la Plaisance

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Accueil du site > Articles > Les moteurs > Diesel Common-Rail et circuit carburant

Rubrique : Les moteurs

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Diesel Common-Rail et circuit carburant Version imprimable de cet article Version imprimable

Publié Août 2019, (màj Octobre 2019) par : Négofol   

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Une question posée par un membre éminent du site http://www.plaisance-pratique.com/C... au sujet des conséquences du passage à l’injection Common-Rail sur les petits moteurs Yanmar tend à montrer que cette évolution est mal cernée et que les problèmes qu’elle pose sont sous-estimés ou ignorés. Ceci semble justifier un article pour faciliter la recherche, plutôt que de développer dans les réponses à une question sur le forum.

L’injection Common-Rail :

Common-rail est l’appellation courante du système d’injection à rampe haute-pression et injecteurs contrôlés.

Le premier système Common-Rail a été breveté par Vickers en ... 1913, mais que le système ne s’est développé qu’avec la généralisation du contrôle électronique, à partir de 1997 (Bosch sur Mercedes classe C et E...). A noter que l’essentiel du développement des systèmes modernes d’injection Common-Rail a été fait par la SOPROMI (Societe des Procédés Modernes d’Injection) dans les années 70, une société suisse, en liaison avec l’université de Zürich.

Ce système se compose d’une pompe qui alimente en permanence une rampe commune à tous les cylindres (d’où le nom) en carburant à très haute pression (1 500 à 2 500 bars) maintenue constante par un régulateur dont le débit de fuite retourne au réservoir. Sur cette rampe sont branchés des injecteurs qui sont en fait des électrovannes comportant une aiguille actionnée par un solénoïde ou un actionneur piézoélectrique. Ceci permet un contrôle très fin de l’injection, notamment la possibilité de plusieurs petites injections à chaque temps moteur pour optimiser la pollution et la puissance. Les injecteurs sont contrôlés individuellement par un calculateur qui utilise pour cela de nombreux senseurs : température air, carburant, liquide refroidissement, régime moteur, position de l’arbre à cames, pression carburant, débit d’air à l’admission et d’autres senseurs suivant le niveau de pollution retenu.

Cette technique d’injection a révolutionné le moteur Diesel en permettant d’obtenir des performances inédites, notamment en liaison avec un turbocompresseur à géométrie variable (VGTC) : ceci a permis notamment de voir des voitures Diesel gagner les 24 Heures du Mans (Peugeot, Audi) ce qui était impensable quelques années auparavant.

Une des raisons de passage au Common-Rail, au départ, a été la volonté de minimiser les à-coups du couple d’entrainement de la pompe d’injection (environ 1 kW de puissance nécessaire pendant 1 ms à chaque injection sur une pompe classique) qui posaient problème, notamment sur les moteurs où la pompe était entraînée par une courroie crantée : sur un CR, c’est une pompe hydraulique dont le couple est constant et il n’y a plus de calage de la pompe.

Il n’y a plus aucun Diesel qui ne soit pas Common-Rail dans le secteur automobile en Europe.

L’injection CR a aussi permis une réduction importante des émissions de polluants, au point que les derniers Diesel sont au même niveau, voire moins que les moteurs Essence équivalents. D’ailleurs, la campagne actuelle contre le Diesel est injustifiée scientifiquement. Les mauvaises langues prétendent qu’elle a été embrassée par les politiques pour faire du greenwashing à peu de frais et surtout augmenter discrètement les recettes fiscales, car le gazole, même s’il est taxé comme l’essence pour paraître politiquement correct, présente un pouvoir calorifique au litre supérieur de 20 % à celui de l’essence (densité 0,84 contre 0,7). Passer à l’essence revient mécaniquement à augmenter les recettes fiscales de 20 %, et même un peu plus, du fait d’un rendement calorifique du Diesel un peu meilleur…

L’accroissement inévitable du coût résultant de l’introduction de cette technique a ralenti son introduction dans le domaine Marine : en effet les gains en performances, notamment le très fort couple disponible à bas régime, n’ont guère d’intérêt dans une application Marine où l’hélice n’absorbe que peu de puissance à régime réduit. Les premiers moteurs CR sont apparus en plaisance il y a plus de dix ans, mais dans la gamme des plus de 100 CV (75 kW) car les moteurs de base utilisés pour la marinisation étaient passés au Common-Rail.

Les petits moteurs, basés sur des blocs utilisés sur des tracteurs ou dans les machines du BTP restaient classiques, en l’absence de contraintes sur la pollution. Cette situation est en train d’évoluer avec les normes environnementales et tous les constructeurs passent ou vont passer leur gamme de petits moteurs au Common-Rail, notamment Yanmar comme l’indiquait Pacolarame…

Par contre, avec le CR, en cas de panne, plus grand-chose à faire au niveau du bricoleur : valise de test et échange de la pièce ou du calculateur obligatoire si panne confirmée. Par exemple, un échange d’injecteur nécessitera la reprogrammation du calculateur avec la courbe d’étalonnage de l’injecteur changé (via un code QR sur la boîte…).

Et, bien sûr, pas de moteur en cas de panne électrique.

PDF - 450.5 ko

Le calculateur est inversement capable de détecter un grand nombre de pannes, les mémoriser pour exploitation ultérieure et de gérer des modes dégradés en cas de pannes de certains senseurs. Un exemple dans le document ci-contre qui donne la liste des codes de panne des nouveaux petits Yanmar et des modes dégradés en résultant…

 

Les conséquences sur le circuit carburant :

Cette évolution n’est pas aussi simple qu’elle paraît et va entraîner des conséquences sur la conception des circuits carburant.

PDF - 669.8 ko

Si on se reporte à la brochure Caterpillar LEBW4976-07 (ci-contre), excellente comme toutes les publications de cette société, qui prend en compte les derniers systèmes d’injection et l’évolution des carburants commerciaux, on remarque de nombreuses évolutions par rapport à des textes équivalents plus anciens.

Bien qu’orientée plutôt vers des moteurs plus puissants que ceux couramment rencontré sur nos petits bateaux, les principes restent valables.

J’ai surligné dans le texte les nouveautés remarquables :

  • Figure 2, page 11 : sur le schéma d’un système Common-Rail, on remarque un refroidisseur carburant (cooler), souvent omis sur les schémas, comme celui plus haut. Ce point sera développé plus loin. On remarque aussi la présence d’un système de filtration fin à haute efficacité et la mention d’un troisième étage de filtrage si nécessaire !
  • Figure 4, page 14 : sur le schéma d’un réservoir journalier, similaire en fait au réservoir de nos bateaux, on remarque l’apparition d’un thermomètre carburant. Voir également plus loin.
  • Page 18 apparaissent discrètement une limite de stockage du carburant d’un an et la nécessité de vidanger complètement et nettoyer tout le circuit tous les deux ans (grâce aux trappes d’accès conseillées page 17). On notera que les carburants à bas niveau de soufre (obligatoires en Europe) se dégradent plus vite !
  • Page 21, des conseils pour la conception de la caisse journalière et insistance sur l’importance du bon placement des aspirations et retour carburant à cause de la température…
  • Page 23 apparaît un filtre à carburant à haute efficacité (2 μm)
  • Page 24 : préfiltre à 10 μm ; « avant » c’était 100 μm et 10 μm…
  • Page 29 : indications de température maximale du carburant à l’entrée du moteur
  • Page 30 : incidente sur la possibilité de nécessité d’utilisation d’un refroidisseur à carburant
  • Page 35 à 45 : dix pages sur le dimensionnement de la caisse journalière et le calcul des températures !

Le problème de la température carburant :

Dans le système Common-rail, le carburant est comprimé à très haute pression et circule dans la culasse du moteur avant de passer par un régulateur de pression et retourner au réservoir. Il est donc significativement réchauffé durant ce circuit.

Cet échauffement entraîne d’importantes conséquences pour la conception et le fonctionnement du circuit. L’annexe 1 du document détaille le calcul correspondant. Ce calcul est assez fastidieux à suivre (et encore plus à mener), mais il suffit de retenir les ordres de grandeurs :

Bon, l’exemple est un moteur de 4 500 CV, mais, page 37 :

  • Volume carburant aspiré : 72 litres/mn
  • Carburant consommé : 13.5 litres/mn
  • Retour réservoir : 59.5 litres /mn, soit 82 % du volume aspiré !
  • Echauffement carburant 12.5 °C (22.8 °F)

Ceci paraît peu, mais il faut comprendre que le carburant va s’échauffer de cette valeur à chaque passage dans le moteur : c’est la différence entre température d’entrée et température de sortie.

Si le réservoir est mal ventilé et le niveau bas, la température du carburant va monter rapidement, ce que montre le calcul : page 42, il apparaît que lorsque la caisse journalière (bien qu’on suppose qu’elle rayonne une partie de la chaleur) a été à demi-vidée, elle est déjà à 60 °C (140°F) …

Cette température approche des limites admissibles à l’entrée du moteur et, surtout, cette température dépasse celle du point-éclair du gazole (52 °C d’après la norme), et donc, l’atmosphère du réservoir est devenue potentiellement explosive…

Il est certain que cette situation est inadmissible et qu’il faut prévoir un échangeur de refroidissement du carburant retour…

Une anecdote personnelle :

En 1991, dans le cadre de la société où je travaillais, nous avons conçu le circuit carburant de Jet Ruban Bleu, une vedette conçue pour tenter de battre le record de la traversée de l’Atlantique au moteur. Les réservoirs étaient des réservoirs souples contenus dans une structure en sandwich Nida Nomex-Carbone, donc bien isolés thermiquement. Il était prévu un routage visant à arriver avec un reste de carburant très réduit. J’avais fait le calcul comme détaillé dans l’annexe 1 et demandé l’installation d’un échangeur sur le retour carburant (un Diesel MTU de 4 000 CV, avec une injection rampe commune et injecteurs pompe, un prédécesseur du Common-Rail, assez similaire au point de vue température carburant). On m’avait regardé bizarrement (y compris les ingénieurs de MTU…), mais l’échangeur avait été installé (un échangeur d’inverseur) et grâce à l’eau froide de l’Atlantique, la température de la caisse journalière n’a jamais dépassé 20°C… le record n’a pas été battu, mais c’est une autre histoire, non liée au carburant (concurrent hors catégorie : l’Aga Kahn… Cherchez Destriero sur Internet : 60 000 CV…).
Amusant de revoir ce calcul généralisé…

Et l’automobile ?

Il m’est arrivé d’évoquer le problème avec des amis et de m’attirer la réponse : « c’est un machin d’ingénieur, c’est pour les gros, sur ma Reno/Pijot, rien de tout ça…). Et bien c’est une erreur, c’était « avant » : toutes les voitures Diesel Common-Rail ont un refroidisseur de carburant sur le retour qui peut prendre diverses formes : un vrai radiateur semblable à un radiateur d’huile (ex : Mercedes Classe E) ou un système plus rustique sur les voitures moins puissantes (exemple Peugeot 407)…
Il faut parfois le chercher et les constructeurs sont très discrets sur le sujet…

Mercedes
Peugeot


Conclusion :

Le temps des Diesel avec une injection purement mécanique est malheureusement révolu avec les nouvelles normes de pollution.

Le remplacement d’un système d’injection classique par un système Common-Rail n’est pas innocent et, en particulier, le problème du retour carburant devra être envisagé et traité.

Si on peut espérer que les installations d’origine seront correctes (quoique…), il faudra faire attention en cas de remotorisation, car beaucoup de voiliers ont des réservoirs peu accessibles et isolés thermiquement.

La lecture du manuel des nouveaux petits moteurs Yanmar, par exemple, ne fait aucune allusion au problème et ne parle pas de refroidisseur carburant, par exemple…
On peut noter que Bowman, un des spécialistes, propose maintenant des refroidisseurs de carburant...
https://www.ejbowman.co.uk/products...

UP


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7 Messages de forum

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  • Bonsoir,

    Article très clair et utile .Merci à Negofol.

    La question du réchauffement du réservoir m’interpelle cependant. Il n’est pas rare de faire 24 heures de moteur d’affilée en Méditerranée. Mais, pire , la traversée d’une zone anticyclonique ( cas des convoyeurs pro de retour de Guadeloupe qui piquent droit sur les Acores à travers l’anticyclone ou une expérience personnelle : plus de 5 jours non stop au moteur entre Saint Martin et les Bermudes)

    Je reprends vos chiffres et proportions, en adaptant , pour un bateau moyen de 12 metres , une conso horaire de 3 litres et un reservoir de service proposé à 200 litres. (soit 100 litres à mi conso).

    Volume carburant aspiré : 16, 7 litres/heure
    Carburant consommé : 3 litres/heure
    Retour réservoir :13, 7 litres /heure, soit 82 % du volume aspiré !
    Echauffement carburant 12.5 °C (22.8 °F)

    Je fais une grosse approximation, les 12, 5°C sont à la minute dans l’exemple industriel. J’ai garde ci dessous la même valeur pour le réchauffement du flux horaire.

    En un peu moins de 8 heures (8 x 13, 7 # 100 ) ,, on élève (en supposant l’absence de pertes supplementaires ) la température du demi réservoir de 12, 5 ° C . En 24 heures, de 37, 5 ° En 48 heures de fonctionnement , de 75° C..
    Ceci s’aggravant lorsque le réservoir continue à se vider.

    A défaut d’un refroidisseur, le fait mérite bien un avertissement. Je ne vois rien dans les docs Yanmar que je peux trouver pour le moment.

    Répondre à ce message

    • 8 août 2019 07:12, par Négofol écrire     UP     Ce message répond à ... Animateur

      C’est bien pour cette raison que tous les constructeurs de voitures, pourtant notoirement pingres, prévoient un refroidisseur... Beaucoup d’automobilistes roulent avec un réservoir presque vide et les réservoirs modernes, en polyéthylène rotomoulés sont mauvais conducteurs de la chaleur.

      Attention, dans l’exemple Caterpillar, ce n’est pas un échauffement à la minute , mais la différence de température entre entrée et sortie moteur à chaque passage. Le calcul est un peu complexe et bien détaillé dans l’annexe 1, mais de toutes façons le problème existe.

      Répondre à ce message

  • 8 août 2019 02:45, par yoruk écrire     UP Animateur

    Pour vous faire gagner du temps, le lien vers la page Wkipedia recommandée par Negofol. C’est une très belle histoire

    Puis cliquer : « Destriero - unité navale construite par Fincantieri » pour avoir la traduction en direct

    Répondre à ce message

    • 8 août 2019 07:09, par Négofol écrire     UP     Ce message répond à ... Animateur

      Une des raisons de l’abandon de Destriero a été qu’après le record la coque était fissurée de partout, le gros problème des bateaux aluminium (l’arrière de la plupart des NGV alu est ressoudé périodiquement...) . Le même problème avait d’ailleurs été rencontré sur Virgin Atlantic Challenger II en 1984...

      L’équipage a du lutter pour maintenir l’alimentation des moteurs en carburant sans eau de mer qui pénétrait dans les réservoirs structuraux par les fissures... Mais ça ne fait pas partie de l’histoire officielle.

      C’est pour éviter ce problème que j’avais retenue pour Jet Ruban Bleu une solution de réservoirs souples, comme en aéronautique. Nous avions proposé la solution à Fincantieri, mais c’était quasiment impossible et trop cher avec la solution structurale choisie.

      Au lancement du programme se trouvait Stefano Casiraghi, le mari de Caroline de Monaco, fana de courses offshore (il est décédé en 1990 d’un accident en course), qui avait su convaincre l’Aga Kahn et la fine fleur du yacht Club de Porto Cervo...

      Cesare Fiorio, noté comme organisateur du défi, était à l’époque directeur sportif de l’équipe de Ferrari en F1.

      http://www.shipspotting.com/gallery...

      J’ai ouï-dire que les moteurs et hydrojets ont été revendus...

      Destriero était un bateau très intéressant : carène dessinée par Donald Blount, le pape des coques planantes à l’époque, qui la considérait comme une de ses plus réussies. Il est en effet très difficile de dessiner une carène qui fonctionne bien (qualités nautiques, stabilité, passage dans la vague) avec un déplacement qui varie de 3 à 1 au cours de la traversée, sans possibilité de ballastage pour équilibrer... Les superstructures avaient été « designé » chez Pinin Farina !

      3 turbines GE 1600 (dérivée du F 404, le réacteur du F18 Hornet, entre autres), hydrojets KaMeWa

      Coque complètement vide au-dessus des réservoirs qui occupaient tous les fonds,ancre, chaîne et guindeau au minimum... et peu pratique : seuls les deux hydrojets extérieurs avaient des coquilles de marche arrière et de direction, de sorte qu’il fallait démarrer 40 000 CV pour changer de place à quai... Un plan de transformation en yacht (qui aurait comporté les remplacements des turbines externes par des Diesels plus sobres) n’est pas apparu rentable ou faisable vu l’état du bateau à l’arrivée....

      Consommation plein gaz (63 kts) : 12 000 l/h

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  • 8 août 2019 12:10, par Négofol écrire     UP Animateur

    Mais quand même une belle bête...

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