Préambule
- Pourquoi cet article :
Indiquer la façon de connecter au bateau la terre du réseau 230V du quai n’est pas simple, malgré les apparences. En effet, il y va de la sécurité des personnes, du respect des normes variables selon les pays, et des contraintes imposées par l’installation électrique variable selon les bateaux, ainsi que du matériau de leur carène.
Cet article doit être évolutif. En fonction des discussions précises et argumentées qui le suivront et des normes qui évoluent, le contenu pourra être modifié au fur-et-à-mesure.
On a choisi de montrer des cas par ordre croissant de complications, et la description de chaque cas va conduire naturellement à l’un des cas suivants. On trouvera quelques définitions à ce lien
- Les auteurs et le site « Plaisance Pratique » dégagent toute responsabilité consécutive à l’utilisation incorrecte des informations et schémas reproduits dans le présent ouvrage, et ne sauraient être tenus responsables ni d’éventuelles erreurs ou omissions, ni de conséquences liées à la mise en oeuvre des informations et schémas contenus dans cet ouvrage.
Le disjoncteur différentiel
- Ce disjoncteur différentiel est le premier élément, et l’élément de base de toute installation sécurisée Note 5 . Il sera monté dès l’entrée du secteur 230V sur le bateau. Il doit être à moins de 50cm de l’entrée, ou, s’il est plus loin, la ligne doit être protégée spécifiquement Note 6.
- Il faut se souvenir qu’un disjoncteur différentiel de 30mA , parfois décrit comme une protection ultime qui permet de se libérer de tout soucis, ne doit pas conduire à « faire n’importe quoi » avec la protection de terre. On voit sur la figure ci-contre que le risque à 30mA n’est pas nul, même si la personne n’a pas de fragilité particulière.
A 40mA la fibrillation ventriculaire se produit en 3 secondes .... http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89... - Cet article suppose que le bateau possède un disjoncteur différentiel comme premier élément à l’entrée du secteur du quai Note 5.
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La connexion équipotentielle du bateau
- Une ligne équipotentielle, pour quoi faire :
Dans nos maisons, on enfonce dans la terre un piquet standardisé qui permet de construire dans toute la maison une « ligne équipotentielle » qu’on appelle « terre ». C’est sur cette ligne que seront branchées toutes les connexions de terre des prises et des carcasses des appareils. C’est cette « terre » qui assure une grande partie de la sécurité dans la mesure où tous les objets métalliques susceptibles d’être touchés y sont raccordés.
Dans le bateau on construit une ligne équipotentielle qui relie tous les objets métalliques du bateau : moteur, passe coque, hélice, gréement, anodes, etc ... La différence par rapport à une maison, c’est que la connexion de cette ligne à la mer (pour faire une « terre de mer ») n’est pas stable : les parties métalliques immergées peuvent être peintes, couvertes de concrétions, etc ... Parfois on compte sur l’arbre d’hélice pour assurer le contact avec la mer, mais la continuité électrique de l’arbre avec le moteur n’est pas toujours assurée selon le mode d’accouplement.
- Ligne équipotentielle, anodes et électrolyse :
Le courant galvanique destructeur entre les diverse pièces métalliques du bateau plongées dans l’eau salée ne peut passer que si les pièces sont électriquement reliées. D’où l’idée simpliste qu’il ne faut pas relier les pièces métalliques entre elles par une liaison équipotentielle pour éviter les courants destructeurs entre les éléments métalliques.
Mais en pratique, c’est ennuyeux parce qu’il faudrait alors affubler chaque élément métallique du bateau de son anode sacrificielle. Et de plus il y aura entre ces pièces des connexions électriques qu’on ignore et qui ne sont pas maîtrisées : soit par les circuits électriques, soit par la conduction de parois supposées isolantes mais qui mouillées sont plus ou moins conductrices.
On maîtrise mieux le problème en reliant toutes les pièces en équipotentiel. Et pour éviter que deux pièces de métal différent reliées électriquement ne se bouffent entre-elles, on affuble la ligne équipotentielle d’anodes sacrificielles qui protègeront tous les éléments relies par la ligne
La législation règlementaire
- Particularités locales et mises à jour :
La construction d’un bateau est soumise à des contraintes de normes et de règlementation diverses et parfois très complexes à interpréter. En Europe on parle de norme ISO et aux USA de norme ABYC. En plus, selon le pays, des règlementations locales peuvent appliquer ces normes en dérogeant à certains articles ou en ajoutant d’autres articles.
La norme ISO-13297 est sur le point de diffuser une mise à jour 2012. Un rapprochement entre ISO et ABYC est en cours (http://www.nxtbook.com/nxtbooks/nay...).
Les normes ISO à jour sont des documents à commander auprès des organismes officiels ISO-13297 mais une version ancienne est disponible sur le Web.
Les normes ABYC sont également disponibles auprès des organismes officiels , E-11 et A-28 dans des versions anciennes sont disponibles sur le Web http://www.nmma.org/assets/cabinets... et http://www.abycinc.org/committees/....
- Des éléments de règlementation sont citées dans le texte, en voici la liste :
- L’application et l’interprétation de ces normes et règlementations est de l’entière responsabilité du lecteur quels que soient les indications fournies dans cet article.
Les cheminements possibles de la terre du quai et de la « terre de mer »
Cas 1
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Secteur 230V indépendant et isolé
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- On consultera à ce sujet :
La Note 1 indique que si un différentiel est installé, la terre du quai n’a pas besoin d’être branchée au « - » de la batterie, mais elle ne dispense pas de brancher la terre du quai à tous les appareils fonctionnant en 230V comportant une connexion terre. Il y a parfois confusion à ce sujet, voir la Note 8. La Note 9 indique qu’elle doit aussi être connectée à la ligne équipotentielle.
La Note 2 indique que si le circuit 12V est bifilaire isolé (sans connexion à la ligne équipotentielle, alors la terre du quai doit également être branchée à la ligne équipotentielle.
Cas 3
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Empêcher la corrosion galvanique par la terre de quai
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Cas 5
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Reconstruction d’un neutre et d’une phase locale dans le bateau
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Les circuits 12 volts et la connexion de terre du quai et de la « terre de mer »
- On a vu précédemment que s’il n’y a pas de transformateur d’isolement il est fortement souhaitable d’installer un isolateur galvanique pour limiter les problèmes de corrosion dus à une mauvaise terre de quai. On supposera donc ci-dessous qu’on a installé soit un isolateur galvanique, soit un transformateur d’isolement
Cas 6
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Secteur 230V et circuits 12V indépendants et isolés Identique au cas 1
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Cas 7
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Circuit 12V câblé en bifilaire et isolé de la ligne équipotentielle
La Note 2 indique que si le circuit 12V est bifilaire isolé (sans connexion à la ligne équipotentielle, alors la terre du quai doit être branchée à la ligne équipotentielle.
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Cas 8
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Circuit 12V connecté à la ligne équipotentielle
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Cas 9
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Reconstruction d’un neutre et d’une phase locale dans le bateau Identique au cas 5
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Synthèse et conclusion
Deux montages au choix pourront donner satisfaction en restant simple, conforme aux normes.
Ils dérivent des cas 7, 8 et 9
Mémoires amusantes ou consternantes de « pro »
Les installations électriques à bord des bateaux de plaisance défient parfois l’entendement, au détriment de la sécurité :
- Sur beaucoup de bateaux américains, même récents il n’y a pas de disjoncteur différentiel ... Le dernier à qui j’ai vendu un transformateur d’isolement avait sur la même barre de cuivre la terre, le neutre et le négatif batterie, et juste un disjoncteur magnéto-thermique à l’entrée.
- Un jour où je travaillais sur les frigos d’un voilier en alu, il y avait à bord un « électricien » qui travaillait dans l’armoire électrique 230 volts, et qui gueulait depuis un quart d’heure en disant « quelle bande de cons dans cette marina, mais cons à ce point c’est pas possible ».
Après qu’il ai répété vingt fois la même chose je lui demande quel est le problème... et il me montre son multimètre en disant qu’il a du 230 volts entre neutre et terre, et zéro volts entre phase et terre...
Je lui ai suggéré de croiser les fils de sa rallonge de quai... Le quai était bien entendu correctement câblé !
- L’histoire se passe dans un voilier en alu de 25 mètres, sur le « dry dock ». C’est moi qui avait fait l’installation électrique du « dry dock », alimenté par un groupe électrogène. Pour les gros bateaux, le carénage me payait une heure de boulot pour les brancher, pour éviter qu’ils n’aillent bricoler dans l’armoire électrique. Pour les plus petits bateaux il y avait toute une série de prises standard.
Je branche donc le bateau, démarre le groupe et envoie le jus... ça disjoncte. Le skipper me dit alors que ça disjonctait aussi la prise du ponton. Je dis alors au skipper que je fournis le jus, les problèmes du bateau ne sont pas les miens... et il pleure qu’il a besoin d’énergie pour ses frigos pleins... Bon, je me laisse attendrir, vais chercher mon mégohmmètre et commence à chercher, ça m’a pris trois heures !
Pas de différentiel à bord, et des disjoncteurs magnéto-thermiques unipolaires ! Pas pratique de devoir débrancher un à un tous les neutres repris sur une barre de cuivre !
J’ai fini par trouver le coupable : un câble de 3 x 6 mm² raccordé à rien, dont l’extrémité trainait dans le fond de la coque en aluminium... ! avec un énorme champignon vert au bout ! ....
Habituellement alimenté par son groupe électrogène, il n’y avait pas de problèmes, mais il est vrai qu’en France il n’est pas obligatoire d’avoir un disjoncteur différentiel pour un groupe électrogène embarqué, pas plus que pour un convertisseur d’ailleurs... (en tous cas à l’époque...)