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Publié Avril 2018, (màj Avril 2018) par : DomH |
Ces trois ou quatre dernières décennies, les connaissances en climatologie et en météorologie s’accumulent à grande vitesse et surtout les données mises à disposition de tous par les grandes structures météorologiques est en croissance « plus » qu’exponentielle.
Le but de cet article n’est en aucun cas un cours sur la météorologie, un cours sur le routage météorologique ou un guide pour interpréter les données météorologiques, encore moins un outil d’aide à la décision de la meilleure route à prendre.
Il essaie simplement de faire un point de situation sur les données et les outils qui me semblent pertinents, de bonne qualité, accessibles à toutes et tous tant techniquement que financièrement.
ndlr préambule : cet article est une copie du document édité par Dominique Hausser, voir http://dominique.hausser.ch/Meteoro... .
C’est sa conclusion : “Ce papier deviendra probablement rapidement dépassé. Alors n’hésitez pas à en produire de nouvelles versions.” qui nous encourage à le publier, ici sur PTP, ouvert à vos commentaires
Sommaire
Ce qui me faisait envie et ce qui me fait toujours envie, c’est l’océan, le plaisir de ces paysages loin de toute terre qui change à chaque seconde, de forme et de couleur, sans parler des surprises animales qui peuvent apparaître à tout instant.
Alors, dès l’instant où l’on part pour des traversées de plusieurs jours ; avec notre petit Flot18 (un peu moins de 8 mètres à la ligne de flottaison et un tirant d’eau faible – donc beaucoup de dérive) la vitesse moyenne était faible et il n’y avait pas besoin d’aller loin pour que cela prenne du temps. Dès lors, la météorologie avait toute son importance. Nous étions curieux et nous voulions savoir à quelle sauce nous allions être mangé.
C’était difficile, car la qualité des prévisions météorologiques n’étaient pas ce quelles sont aujourd’hui ; sa fiabilité était largement dépendante de la région, car les données récoltées par les services météo étaient variables tant quantitativement que qualitativement. Une prévision fiable pour les 48 heures à venir, c’était déjà bien. La réception des bulletins étaient une gageure. Même à proximité des côtes et selon les zones de navigation, on n’obtenait pas toujours ce qui aurait pu nous aider à réfléchir. Au large, il y avait les grandes ondes et le bulletin du large pour le Nord Atlantique diffusé deux fois par jour par une radio publique ; on pouvait espérer d’autres sources, mais il fallait chercher (sans internet...), il fallait avoir les fréquences des radios qui variaient selon les positions et les heures de la journée, sans parler des « parasites » qui rendaient plus souvent que souhaité la réception inaudible.
Une fois les bulletins récupérés, le travail de routage démarrait pour ne pas se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment. Ce qui impliquait de dessiner la position des systèmes, de position force et direction du vent dans les différents secteurs (ce qui impliquait de connaître la position des zones utilisées par les différents émetteurs de bulletins). Avec plusieurs sources cela compliquait encore la tâche, car les zones ne se recoupaient évidemment pas et la probabilité que la situation et la prévision était non nulle ; il serait ici trop long d’expliquer les raisons de ces différences.
Il y avait bien sûr les « Pilots Charts » qui fournissaient des informations fort utiles, mais dans les faits de nature probabiliste, ce qui signifiait qu’il était impossible de déduire qu’elle serait la situation effective au moment et à l’endroit présent. Il n’était donc pas rare d’avoir un vent à 180° de la direction la plus « fréquente » et de force complètement différente de celle la plus « probable ».
L’observation du ciel était (et l’est toujours) absolument indispensable pour se faire une idée de la situation locale. Mon livre de chevet pour l’observation des nuages était l’atlas international des nuages [1]
Notre « bible » [2] pour nous aider dans notre travail d’interprétation a été pendant des années le remarquable ouvrage de René Mayençon, Météorologie marine publié en 1982 et réédité en 1992 [3] Puis Jean-Yves Bernot a publié successivement 2 ouvrages [4] qui sont les références toujours actuelles en matière de météorologie marine. Malgré le fait d’avoir pris le temps d’améliorer mes connaissances entre 1982 et 2004 en lisant tous les ouvrages, articles et autres documents concernant la météorologie marine, il m’a fallu m’accrocher à leur lecture.
Plus je naviguais, plus je réalisais que les données météorologiques m’aidaient à choisir la meilleure route possible [5]. Les données étaient les mêmes, l’analyse aboutissait au même résultat de l’évolution de la situation météorologique ; le choix de la route était largement dépendant du programme de navigation (régates ou croisières pour rester dans une catégorisation générale).
Ces dernières années, le nombre et la qualité des données recueillies a littéralement explosé. Les sources se sont également multipliées : des données terrestres, des données marines, des données au sol, des données en l’air, des données satellitaires… sont partagées et utilisées quotidiennement par les prévisionnistes du monde entier. Avec l’augmentation de la puissance de calcul des ordinateurs, les modèles numériques météorologiques ont pris une importance de plus en plus grande, permettant d’augmenter considérablement le nombre de paramètres utilisés, d’utiliser des modèles de plus en plus sophistiqué prenant en considération la morphologie du terrain et de sortir des résultats nettement plus rapidement (de plusieurs semaines parfois à quelques heures actuellement).
Longtemps réservé à la navigation militaire et commerciale, l’accès aux technologies permettant la réception des données numériques s’est étendue aux « petits bateaux ». Dans un premier temps, ce sont presque exclusivement les voiliers de course qui sont équipés et je suivais avec envie l’évolution de ces équipements lors des grandes courses au large. Depuis quelques années, l’accès aux données numériques devient presque « facile » à bord d’un bateau de plaisance, non seulement en termes de technologies, mais également en termes de prix.
« Le routage météorologique embarqué appliqué aux voiliers de course ou de croisière est une pratique récente liée à l’émergence de l’informatique. On l’a vu naître dans les années 1980, se développer auprès des coureurs océaniques dans les années 1990 et se généraliser pour le grand public dans les années 2000. » [6]. Disons que dans les années 2000, nous n’étions encore pas très nombreux à s’être lancé dans l’utilisation de l’informatique pour élaborer notre propre prévision.
La décision prise par l’Union européenne de mettre gratuitement les données produites par les structures publiques à disposition de tous (opendata) a très largement contribué à l’accélération à l’accès à de nombreuses données diffusées de manière brute ou déjà retravaillée pour des objectifs spécifiques par des sources en régulière augmentation. Il n’y a dès lors plus aucune raison de s’en priver et de largement s’appuyer sur le routage de notre embarcation pour assurer la sécurité de l’équipage et du bateau [7] en complément des bulletins de prévisions météorologiques émis par les institutions officielles ou reconnues.
Les courants, la houle et les vagues sont des paramètres clés pour la navigation, car ce sont eux qui déterminent principalement l’état de la mer.
Comme marin, nous nous intéressons avant tout à l’impact que va avoir le vent et l’état de la mer sur notre navigation présente et à venir. Ce qui va déterminer le choix des données auxquelles nous souhaitons avoir accès.
Les prévisions du temps expertisées, c’est-à-dire préparées par des météorologues prévisionnistes professionnels, offrent une synthèse analytique de données multiples. Il faut comprendre la terminologie utilisée, mais ne nécessite pas de hautes compétences de prévisionnistes pour les utiliser et prendre les décisions adéquates en fonction des objectifs recherchés.
Tous les services météorologiques des États fournissent des bulletins expertisés et très souvent même des bulletins spécialisés pour la navigation côtière et hauturière.
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Parmi les différents modèles atmosphériques utilisés par les services météorologiques, les principaux utilisés pour la prévision maritime sont les suivants :
Où peut-on trouver ces données et sous quelles formes ?
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Les bulletins de prévisions du temps expertisées sont disponibles sur tous les sites d’instituts météorologiques nationaux ; en faire la liste reviendrait à couvrir l’ensemble des États se trouvant au bord d’un plan d’eau marin (océan et mer).
De nombreux sites permettent de visualiser le résultat des simulations des différents modèles. A nouveau la plupart des sites des instituts météorologiques nationaux publient ces données sous forme de cartes animées.
Il y a cependant quelques sites [11] qui fournissent des données nombreuses et détaillées pour une couverture globale (planétaire) ou régionale :
Enfin à l’aide d’outils (voir le point suivant pour une description de ces outils) de lecture de fichiers grib et de visualiseur de modèles numériques du temps, il est possible de travailler sans avoir de connexion internet à haut débit et à des coûts raisonnables ; ce qui est le cas en navigation hors de portée des émetteurs internet (câble, wifi, GSM).
Pour ne pas produire une liste rapidement dépassée, j’invite le lecteur à se référer à la liste disponible sur OpenGribs.
Il existe peu d’outils développés strictement sous une licence libre telle que GNU GPL ; certains outils sont disponibles gratuitement sous forme « bridée » et/ou sur certaines plateformes seulement ; leur coût est en général modeste, raison pour laquelle je mentionne ceux qui me semblent malgré tout être utiles dans certaines circonstances.
“Ce papier deviendra probablement rapidement dépassé. Alors n’hésitez pas à en produire de nouvelles versions.”
[1] Pour son histoire : https://cloudatlas.wmo.int/history-...
et https://fr.wikipedia.org/wiki/Atlas...
[2] Terme qu’utilise aussi Jean-Yves Bernot, auteur des « bibles » actuelles ; pour les références, voir la note 4.
[3] Voir cette recension :http://documents.irevues.inist.fr/b...
[4] Jean-Yves Bernot : Météo et stratégie : Croisière et course au large, Paris, Voiles Gallimard, 2004 (2e édition 2010), 624 p._ Jean-Yves Bernot : Météo locale : Croisière et régate, Paris, Voiles Gallimard, 2007, 592 p.
[5] Je ne suis pas le seul. Je vous invite à lire le texte de Frédéric d’Allest à ce propos : Choisir sa route au large en fonction de la météo [[http://artimon1.free.fr/Choisir%20s...
[6] Jean-Yves Bernot, p 13 ; Les routages en course et en croisière. Paris, Voiles et voiliers, 2014, 207p
[7] Voir à ce sujet « Bonnes pratiques pour assurer la sécurité météo en haute mer », un document publié en 2016 par la commission « sécurité en haute mer » de l’association « Sail the World » (http://stw.fr/fr/blogs/securite-hau...)
[8] pour plus de détails sur les modèles développés, voir http://www.emc.ncep.noaa.gov/home.php, la page du National Weather Service’s National Centers For Environmental Prediction’s Environmental Modeling Center.
[9] Ce modèle est aussi nommé NAM, WRF, ou NMM
[10] Ce modèle est aussi connu sous le nom HARMONIE-AROME, à ne pas confondre avec le modèle AROME utilisé par Météo-France
[11] La liste est loin d’être exhaustive ; les sites mentionnés sont ceux que j’utilise régulièrement
[12] License : Creative Commons Attribution-NonCommercial 4.0 International License.
[13] Ce site offre une grande variété de données de qualité. Une partie de l’offre est payante.
[14] Concernant les modèles et les sources des modèles voir https://community.windy.com/topic/1... et concernant les modèles et les structures (framework) de modélisation voir http://www.nomads.ncep.noaa.gov/txt...