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Accueil du site > Articles > En navigation > Météorologie > Les vents > Le Cers ou la Tramontane ?

Rubrique : Les vents

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Le Cers ou la Tramontane ?Version imprimable de cet article Version imprimable

Publié Août 2021, (màj Avril 2023) par : Négofol   

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Si on consulte le site Météo France, on trouve cette rose des vents pour les vents de Méditerranée.

Eh bien, c’est faux ! Une invention de Parisien…

En effet le terme de Tramontane est un terme d’origine italienne, semble-t-il, apparu tardivement : la première mention de Tramontane (tramontana) date seulement de 1276 (Raymond Lulle, le livre de contemplation de Dieu)


Le Cers et le Mistral sont les grands vents de la côte méditerranéenne.
Les zones d’influence de ces vents se répartissent approximativement ainsi.


Le Cers :

Le terme historique est le Cers.

Le Cers, est un vent venant du nord-ouest de Narbonne, parfois très violent, soufflant dans le Languedoc près de la côte méditerranéenne. Il est toujours sec, mais est froid en hiver et parfois très chaud en été.

Les Romains considéraient que c’était grâce à lui que Narbonne (la capitale quand même...) était salubre (= pas de paludisme) En effet, il est sain et assèche, fait partir les moustiques et dégage le ciel des nuages.

Ils ont donc fait du Cers un dieu « Cercius » et lui ont élevé un temple (sur le Mont Saint-Cyr,‭ (Sanctus Circius ‬suite à récupération par les chrétiens, qui ne se sont pas foulés pour le rebaptiser…) entre Ouveillan et Sallèles,‭ ‬ édifié‭ ‬en‭ ‬14‭ ‬au nom de l’empereur Auguste, 48 m d’altitude, coordonnées 43.266099, 2.960143 si vous êtes curieux‭).

A noter qu’en grec ancien, le mot Χῶρος désigne également le vent du Nord-Ouest, et ils étaient là bien avant les Romains (Ensérune au VIIème siècle avant JC, 13 km ENE du Mont Saint-Cyr).

Ce nom est attesté anciennement, notamment :

Caton l’Ancien,
Les Origines, VII : (IIe siècle av. J.Cl) :

« Le vent Cercius s’engouffre dans la bouche quand on parle. Il est si violent qu’il ébranle un homme armé et même un chariot chargé. »

Sénèque,
De Natura Rerum, Livre V, XVII (62 ap. JC) :

« L’Atabulus tourmente l’Apulie, l’Iapyx la Calabre, le Sciron Athènes, le Catégis la Pamphylie, le Circius la Gaule. Bien que ce dernier renverse même des édifices, les habitants lui rendent grâces ; ils croient lui devoir la salubrité de leur ciel. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’Auguste, pendant son séjour en Gaule, lui voua un temple qu’il bâtit en effet. »

Pline l’Ancien (qui était un marin, entre autres Préfet de la flotte de Misène) Naturalis Historia Livre II, XLVI (vers 77 ap. JC) :

« Dans la Narbonnaise, il est un vent très célèbre, le Circius, qui ne le cède en violence à aucun, et qui la plupart du temps porte à Ostie en droite ligne, à travers la mer de Ligurie. »

A noter qu’à l’époque Narbonne était le deuxième port de la Méditerranée après Ostie, d’où la pertinence de la remarque.


Météorologie :

Le contexte météorologique favorable à l’établissement du Cers (et du Mistral, souvent associés, mais pas toujours) est une zone anticyclonique sur le proche Atlantique se prolongeant vers l’Espagne et le Sud-ouest de la France.

Cette zone de hautes pressions va générer un flux de secteur nord à nord-ouest.
Une dépression sur le Golfe de Gênes ou sur la mer Tyrrhénienne va resserrer les isobares.

Les chaînes de montagnes du Massif central et des Pyrénées vont finir de renforcer ce vent en raison de l’effet venturi.

Le Cers souffle en Narbonnais, d’ouest à nord-ouest, en moyenne 245 jours par an.

Il est à noter que le Cers est généralement plus violent que le Mistral. Il en est de même pour le nombre de jours ventés par an, n’en déplaise aux Provençaux.
 
 

Une ville comme Perpignan observe en moyenne 115 jours de vent violent par an (uniquement pour le vent de terre) contre 58 pour Nîmes. Ainsi, en moyenne, la tramontane souffle deux fois plus de temps à Perpignan que le mistral à Nîmes.

La rose des vents de la station de Carcassonne le montre bien (et le record enregistré est de 184 km/h en 2 009)


La Tramontane

Le cers n’est pas une tramontane, mais au contraire, un vent de plaine, il passe entre le Massif central et les Pyrénées par le seuil de Naurouze.

Le nom Tramontane est donc un néologisme relatif qui n’est pas ou peu employé localement.

On ne l’utilise guère

  • qu’entre Montpellier et Sète (où il désigne plutôt le vent du NNO, qui descend des Cévennes)
  • et en pays catalan (où le terme est justifié, le vent passant au-dessus des contreforts des Pyrénées). Le cers devient la tramuntane à partir de Salses et jusqu’au sud de Barcelone, puis vers Tarragone, il redevient le cers (en catalan el cerç).

Un effet de foehn est possible, notamment en Roussillon.

A noter qu’en Italie, notamment en Ligurie, le nom de tramontane (qui désigne le vent du Nord venu des Alpes) fut aussi donné à l’étoile Polaire, car tout comme l’astre elle indique le nord

Vx. On donnait (...) jadis en Italie le nom de tramontane à l’Étoile polaire, parce qu’elle indique le côté du nord (BOUILLET1859) .

Par opposition naitra l’expression « perdre la tramontane » (traduction littérale de l’italien « perdere la tramontana », attestée surtout au XIXème siècle) signifiant perdre le nord ou être désorienté, égaré, voire avoir perdu la raison. Victor Hugo, dans son recueil de poèmes « Les rayons et les ombres » (1837), dira à propos de la tramontane : « Le vent qui vient à travers la montagne me rendra fou ».

De manière plus contemporaine dans la chanson de Georges Brassens « Je suis un voyou », le chanteur (qui était de Sète) utilise aussi cette expression pour signifier son désarroi : « J’ai perdu la tramontane en trouvant Margot... ».

Le terme aurait été importé à Sète par les Italiens (en occitan, on dit plutôt perdre l’estele).


Du point de vue nautique :

Typiquement, en juillet-août, il fait très beau et chaud, grand ciel bleu, l’eau est bien bleue et calme au bord (mais froide (16°C, voire moins !) à cause d’un upwelling car l’eau de surface est repoussée au large) mais à 500 m du bord on a un bon 5 ou 6, d’où problèmes fréquents avec véliplanchistes ou autres amateurs de plaisirs nautiques…

Sur les régions côtières du sud de la France, si le vent de terre laisse la mer blanchie, on n’observera pas pour autant de vagues significatives. Mais le puissant Cers pourra facilement générer des vagues de 5 m ou plus au large.

La courte « période » de ces vagues les fera déferler, rendant la navigation particulièrement éprouvante pour les bateaux et leurs équipages.

Les hautes digues qui protègent les ports du nord des Baléares attestent de la violence de l’assaut des vagues de tramontane.

Beaucoup de navigateurs gardent un mauvais souvenir du passage du Cap Béar (où on a mesuré une rafale à 202 km/h (110 kts) en avril 1979)…

Malgré sa violence, le Cers/Tramontane est essentiel à l’équilibre des écosystèmes marins côtiers. En effet en poussant les eaux des lagunes vers la mer elle leur permet de se renouveler et d’oxygéner le milieu.

Au final, aucune statistique ne prouve que le nombre de jours avec du Cers est en augmentation ces dernières années, certains anciens prétendent même le contraire. Ce vent fait partie du climat local et cela ne date pas d’hier.

UP


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10 Messages de forum

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  • 12 août 2021 10:30, par lysigee écrire     UP  image Animateur

    Les noms des vents sont relatifs par rapport à la région
    Voici ceux italiens pour la Mediterranée Orientale

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    Répondre à ce message

    • 12 août 2021 11:03, par Négofol écrire     UP     Ce message répond à ... Animateur

      En fait, les variations locales sont innombrables : à Valras-Plage, quand j’apprenais à naviguer, le cers s’appelait le narbonnais. A la campagne à 15 km, c’était redevenu le cers !

      A noter que dans les actes notariés de la région, aux XVII et XVIIIème siècle, les notaires emploient souvent cers comme synonyme de ouest, en concurrence avec ponant...

      Exemple : pour une maison : midy la dite rue Courlanel, cers en deux endroits et aquilon aussy en deux endroits (Aquilon = nord)

      Répondre à ce message

  • 12 août 2021 12:05, par yvesD écrire     UP Animateur

    Selon les cas ce vent (ces vents souvent regroupés sous le nom de tramontane) dévalent le seuil de Neurouze et son goulet ou bien sont plus au sud plus près du massif des pyrénées qui les canalisent également.
    Les vents tempétueux autour de Bear et de son pendant espagnol (la baie de Selva, Llança ?) sont indiscutablement canalisés par les Pyrénées qui les accélèrent violemment (et qui se mélange ensuite aux vents venant du sud des Pyrénées, très sale coin ce cap Bear). Pour ceux là je n’aurai pas d’hésiitation à les appeler tramontane

    A noter, la température (varie selon les saisons) et surtout le coté turbulent (ou pas) des vents au dessus de la terre, turbulence augmentée ou diminuée par la température de l’eau littorale (varie selon les saisons) qui conduit à réchauffer le vent par sa base (augmente l’instabilité) ou le refroidir par la base (diminue l’instabilité) pour produire une mer plus hachée proche de la côte ou à l’inverse un peu au large (à retenir pour la tactique de nav).

    Si les vagues côtières deviennent gênantes pour les véliplanchistes ou peut penser à du vent froid réchauffé par une mer moins froide.

    Dans tous les cas la mer au large est ... ce qu’elle doit être mais le fetch très/trop minime pour ce vent qui devient très/trop vite rapide rend la mer très dure (épicycloidique plutôt que sinusoïdale), très caractéristique de la mer côtière de nos cotes nord méd. Bien plus au large ce fetch est suffisant pour que la mer y soit plus sinusoïdale (plus ... atlantique, plus ronde même si immense).

    Complètement hors sujet mais à rappeler au cas où des fois que : le mistral qui débouche de la vallée du Rhone s’y incurve d’une 20° de degré vers l’est et forme (peut former) une longue veine assez étroite (50 à 70 M ?) et longue (150 M ?) de vent terrible à une vingtaine de mille au large de la camargue. Il faut impérativement s’écarter de cette veine et ne pas se dire qu’on sera plus vite aux Baléares (donc naviguer/fuire au travers 70 ou 250, surtout pas au portant 160) pour trouver des temps plus maniables (rappelé par Mayençon dans son analyse de l’accident du Njord vers 1975 qui à forcé le couple de navigateur à passer un mois dans sa survie. Très marquant à cette époque.

    PS : le fondateur de Météo Marine (Mayençon) donne cette définition de tramontane

    TRAMONTANE On peut considérer que c’est le nom donné au mistral dans la partie occidentale du golfe du Lion. C’est aussi le nom donné aux vents qui proviennent des montagnes en diverses régions, notamment le vent de nord à nord est soufflant en hiver sur le golfe de Gênes.

    Répondre à ce message

  • 2 septembre 2021 21:17, par Cigale écrire     UP  image

    Et avant le Cers, le Kirk :
    Kirk,vent du nord-ouest, dont les Gaulois avaient fait un dieu, que les Romains invoquèrent plus tard sous le nom de cercius. En Languedoc, on donne encore aujourd’hui au vent le nom de cers. Dans la langue des Gaulois, le mot kirk signifiait fougueux, destructeur.

    Répondre à ce message

  • 29 mars 2023 07:59, par yoruk écrire     UP Animateur

    Merci Negofol
    Quand l’actualité sert l’histoire : belle démo d’un vent de Cers (ou Tramontane, maintenant, on sait !) :

    • Un anticyclone (hautes pressions) s’installe au NW de la côte espagnole. Le vent ‘’sort des hautes pressions’’ en formant un angle de 20° avec les isobares
    • Les hauteurs des Pyrénées et celles du Massif Central canalisent, et renforcent le flux de vent ver le seuil du Lauragais (Naurouze, 3 sur la carte)
    • un écart de 8 hPa entre l’Atlantique (1) et le Golfe du Lion (2) déclenche le Cers
    • au sud des Alpes, se creuse la dépression orographique (effet de relief) du Golfes de Gênes, stimulée par les hautes pressions sur l’Autriche
    • La mécanique est en place pour un beau Cers (ou Tramontane) sur la côte narbonnaise... Comme le Mistral, mais ce n’est pas du Mistral, l’effet peut se développer avec violence jusqu’en Sardaigne, voire le Canal de Sicile.
      Michel, à Riposto
    JPEG

    Répondre à ce message

    • Dans l’image que tu joins il est parfaitement visible (== cas d’école) qu’on a affaire à une tramontane et non à un mistral : le flux d’air emprunte bien le canal latéral et le canal du midi et en mer il est orienté plus à l’ouest (moins au nord) et enfin la dépression dite du golfe de Gènes est même à l’est de Gènes (plaine du P^, comme décrit dans les instructions nautiques d’il y a 50 ans)

      Mayençon, que j’ai souvent cité ici, décrit très bien l’avalanche en deux ou trois temps de la masse d’air venue de Lyon et d’Atlantique lorsqu’elle contourne les Alpes (descente dans la vallée du Rhone) puis les escalade pour creuser une dépression du golfe de Gènes souvent plus à l’Ouest (carrément les parages du large d’Antibes plutot que la plaine du Pô).
      J’ai souffert d’un épisode de vrai Mistral (et donc pas de tramontane) à Porto Torrés avec ce vent qui venait du Rhône et léchait (surtout ou large, dans le 330°) toute la côte au sud de Porto Torres (fallait raser la cote pour tenter de passer). Ta tramontane attaque la Sardaigne plus dans le 290°

      Un naufrage célèbre suivi d’un mois de survie, que je rappelle souvent, illustre le danger qu’il y a, avec le vrai mistral, à rester dans le débouché (au sens large, en fait au 160°) du Rhone. On doit retrouver des témoignages comparables pour la vraie Tramontane (encor plus de fetch).

      Mais Peef a bien raison , cette tramontane c’est encore plus fou.

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  • 29 mars 2023 11:02, par PeeF écrire     UP  image

    En ce qui concerne l’évolution des périodes plus ou moins venteuses, les arboriculteurs du Roussillon se plaignent que l’affaiblissement du régime du Cers augmente les risques phytosanitaires sur leurs plantations. On retrouve l’avis des anciens qui jugeaient que l’aspect sanitaire de cette région dépendait du renouvellement d’air et donc de la fréquence et de la force du vent.

    Ceci dit, il faut être têtu comme un catalan pour supporter ce vent de fou aussi bien à terre qu’en mer. A une époque, la SNCF avait transféré un centre d’essai entre Narbonne et Carcassonne depuis la Bretagne. Les wagons de marchandises vides devaient être lestés sur certaines lignes pour rester sur les rails.

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